Promouvoir « la parité » en entreprise : un enjeu de communication source de dépolitisation de l'égalité

Auteurs

  • Emmanuelle Bruneel CELSA Sorbonne Université

DOI :

https://doi.org/10.14428/rcompro.vi12.53163

Mots-clés :

Parité, Discours d’entreprise, Promotion institutionnelle, Égalité, Dépolitisation, Diversité

Résumé

Cet article s’intéresse à une campagne de communication hybride qui fait la promotion du « volet parité » la politique « diversité » de l’entreprise Accenture intitulée Equals. Son objectif, à la fois institutionnel et promotionnel, est d’attirer les talents en montrant l’entreprise énonciatrice comme un espace de travail où il fait bon travailler. Diffusés dans l’espace public comme en interne de l’organisation, les affiches et leurs messages sont les objets analysés ici. Notre analyse critique du discours de campagne montre la manière dont il reproduit une bicatégorisation genrée normative en soulignant que l’engagement égalitariste déclaré est conditionné à une égalité préalable. Il souligne que les efforts consentis par l’entreprise en vue d’un traitement plus égalitaire sont arrimés à la démonstration des compétences et des performances professionnelles des femmes. Cette posture discursive renvoie implicitement au fait que celles-ci sont elles-mêmes responsables des phénomènes inégalitaires qu’elles subissent dans le monde du travail. Les inégalités sources de discriminations ne sont ici ni montrées ni prises en compte. Ce discours de campagne qui présente l’implication de l’entreprise pour davantage d’égalité constitue dès lors, paradoxalement, un discours à caractère euphémique et aux effets dépolitisants.

Biographie de l'auteur

Emmanuelle Bruneel, CELSA Sorbonne Université

Emmanuelle Bruneel est doctorante en sciences de l’information et de la communication au CELSA (l’école de communication de Sorbonne Université). Dans le cadre de ses recherches doctorales, elle étudie différents discours sociaux qui mobilisent l’idée de « diversité » afin de rendre compte du fonctionnement langagier et social de cette formule problématique. Elle montre notamment en quoi certains documents médiatiques (notamment numériques) par lesquels cette formule circule, fabriquent des catégories représentationnelles qui sont imbibées d’idéologie néolibérale et confinent parfois aux stéréotypes. Elle envisage les mises en scène institutionnelles et promotionnelles de « la diversité » et de  « la parité » en tant que ces thématiques sociétales façonnent des imaginaires culturels qui, chemin faisant, se charge et se décharge de valeurs et de normativité sociale. Son approche théorique en sciences de l’information et de la communication est à la fois sémiotique et sociolinguistique, tout en puisant dans les savoirs élaborés en Cultural Studies, en Gender Studies, en Visual Studies et en études postcoloniales. Outre ses recherches doctorales sur les usages néolibéraux de la notion de « diversité » et le fonctionnement dépolitisant de cette formule, elle s’intéresse par ailleurs aux discours de femmes noires françaises, et notamment aux discours militants afroféministes, en tant qu’ils reconfigurent la médiatisation des figures noirs ainsi que les récits qui y sont associés dans l’espace public français.

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Publiée

2021-05-06