No 106 (2016): Équité et efficacité des systèmes scolaires: une comparaison internationale basée sur la mobilité sociale à l'école
Jean Hindricks et Mattéo Godin
Les travaux visant à comparer l’équité des systèmes scolaires entre pays reposent principalement sur le gradient social entre l’indice de l’origine socio-économique des élèves et leurs résultats au test. Ces travaux ont débouché sur des débats pour savoir s’il faut cibler les politiques et efforts pédagogiques sur les élèves faibles ou sur les élèves socialement défavorisés (via la mixité sociale ou un financement différencié). Dans les tests PISA, l’indice socio-économique (ESCS) est basé sur le diplôme et la profession des parents, mais aussi les ressources éducatives et culturelles de la famille. Le gradient social mesure l’impact de l’origine social des élèves sur leurs résultats aux tests. C’est un impact moyen qui ignore la distribution des résultats autour de cette moyenne. L’approche de l’égalité des chances est différente puisqu’elle s’intéresse au lien entre la distribution des résultats scolaires et l’origine sociale des élèves. On peut avoir deux systèmes scolaires avec le même gradient social en moyenne mais des distributions autour de la moyenne très différentes en raison notamment de la proportion d’élèves résilients. Dans cet article nous proposons une comparaison internationale des systèmes scolaires des pays de l’OCDE en termes de mobilité sociale à l’école sur base des résultats des tests PISA entre 2003 et 2012 en mathématiques. Nous calculons pour chaque pays, la mobilité individuelle des élèves sur base de leur rang social comparé à leur rang au test PISA en mathématiques dans leur pays. Nous agrégeons ces mobilités individuelles à l’aide d’un indicateur de mobilité inter-décile qui privilégie la mobilité ascendante, et en particulier celle des élèves en bas de la distribution socio-économique. Cet indice de mobilité inter-décile indique la possibilité pour les élèves d’origine sociale très faible, de déjouer les pronostics (basés sur la ligne du gradient social) et d’échapper ainsi à l’emprise du milieu social. Nous comparons ensuite les pays sur base de leur mobilité sociale interdécile. Nous obtenons une corrélation positive de 40 pour cent entre mobilité sociale à l’école et résultat moyen d’un pays au test PISA entre 2003 et 2012. A l’inverse, nous trouvons une corrélation négative (de – 58 pour cent) entre mobilité sociale à l’école et inégalités scolaires (entre élèves ou entre écoles). Nous baptisons cette relation la courbe de Gatsby de l’école en référence à la courbe de Gatsby des revenus. Nous comparons notre contribution aux travaux en sociologie de l’enseignement.