No 21 (2003): Les petits conflits quotidiens dans les classes de l’enseignement secondaire. 3. Conception de l'autorité chez les élèves
L'étude présentée dans ces pages porte sur l'évaluation que les élèves font des comportements mis en oeuvre par les membres de la dyade qu'il forme avec l'enseignant lors des phases de résolution de conflits, en lien avec les notions de légitimité de l'autorité à agir et à être obéie. Dans la première étude (présentée dans le Cahier de Recherche n° 16), l'analyse portait sur la phase d’initiation de conflits interpersonnels nés dans des dyades enseignant-élève qui ont été déclenchés par des transgressions sociales commises par les élèves eux-mêmes. Elle était donc plus particulièrement centré sur l’analyse des comportements transgressifs déclencheurs des conflits. Dans cette étude, les transgressions ont été interprétées comme remplissant une double fonction : mettre en question l’autorité des enseignants comme étant légitime en soi, et revendiquer une plus grande sphère de juridiction et d’action personnelle dans un contexte dominé par sa structure socioorganisationnelle. Les conflits dans la dyade enseignant-élève ont quant à eux été considéré comme s’inscrivant dans un « ordre développemental des choses », généré par un environnement dont la structure sociale est construite autour de nombreuses règles conventionnelles dont la légitimité intrinsèque n’est pas assez justifiée compte tenu de l’état sociodéveloppemental des adolescents qui le fréquentent. La deuxième étude (présentée dans le cahier de Recherche n° 20) était consacré à l’analyse des séquences interactionnelles qui suivent les comportements déclencheurs. L’importance des comportements unilatéraux mis en oeuvre par les enseignants, quelle que soit la qualité de la relation qui lient ces derniers aux élèves impliqués dans les conflits et l’absence de conséquence néfaste sur la relation laissent penser que les conflits dans la dyade enseignant-élève se déroulent dans un contexte relationnel caractérisé par une structure fermée stable ou les processus interactionnels sont fortement procéduralisés. La nature instrumentale des arguments utilisés par les élèves pour justifier leurs propres comportements soutient l’idée que la relation enseignant-élève est non seulement caractérisée par une structure fermée, mais aussi par une structure compétitive, où la peur de « perdre » face à l’enseignant est une menace qui plane de façon constante. Par ailleurs, l’analyse a permis de montrer comment la remise en cause de l’autorité et la renégociation de ses limites s’effectuaient aussi à travers le processus de résolution de conflits. Les résultats mis en évidence dans la deuxième étude s’inscrivent donc dans la lignée des constats effectués dans la première étude. Le présent Cahier de Recherche se penche sur le jugement que les élèves portent sur les comportements mis en oeuvre au cours du processus de résolution en termes de légitimité de l’autorité à agir et à être obéie.