No 15 (2002): Etat des lieux de mobilité des élèves en cours de scolarité primaire en Communauté française Wallonie – Bruxelles. Une analyse économique et quantitative
A la différence de beaucoup de systèmes scolaires dans d’autres pays européens, la liberté du choix par les parents d’un établissement scolaire est un droit inscrit dans la Constitution belge. Or, depuis un certain nombre d’années, des chercheurs et des professionnels de l’éducation en Communauté française Wallonie-Bruxelles multiplient les interpellations concernant le développement de pratiques de familles changeant leur enfant d’établissement en cours de scolarité primaire. Ce phénomène, communément appelé "zapping" ou "nomadisme scolaire", est généralement jugé problématique : les élèves mobiles seraient plus que les autres confrontés à des difficultés, marqués par le retard scolaire, l’échec et le redoublement. Ces élèves constitueraient également une population socialement moins favorisée que les autres. Enfin, certains observateurs pointent également les difficultés que peut poser la mobilité pour les écoles, tant en terme de construction d’une pédagogie par cycles que d’un projet pédagogique inscrit dans la durée qui présuppose une certaine stabilité du public et des équipes enseignantes.
Cependant peu de travaux scientifiques ont traité systématiquement cette question et les enjeux qui lui sont sous-jacents. Alors que le phénomène de la mobilité est de plus en plus brandi par les acteurs scolaires comme un symptôme d’une relation problématique entre l’école et les parents, aucun examen systématique de l’ampleur et des tenants et aboutissants du phénomène n’a, à notre connaissance, été réalisé jusqu’ici en Communauté française. Les enseignants et directions d’écoles s’y réfèrent quasiexclusivement à travers le terme de « zapping » : les parents changeraient d'établissement au gré des envies et sans raisons apparentes. Ce point du vue interpelle. Il mérite cependant une prise de recul, car un raisonnement simple suggère qu’un phénomène comme la mobilité renvoie potentiellement aux deux côtés de la relation scolaire. Rien n’indique que les parents changent d’école purement au hasard. Quantité des variables potentiellement associées à la mobilité sont du ressort des écoles, comme par exemple la décision de faire doubler un élève.
La recherche dont il est question ici a été développée suite à une commande du cabinet du Ministre de l’Enseignement fondamental. Elle visait donc à combler un vide, à contribuer à améliorer l’état de la réflexion et du débat sur cette question fort sensible. Elle a été menée par des sociologiques et des économistes, ayant travaillé en étroite collaboration. Les uns et les autres ont eu recours à diverses méthodes pour développer chacune des facettes de la mobilité scolaire dans l’enseignement primaire.