Impulsion d’embarquement et embarcation fatale
L’exemple du Vaisseau des morts de B. Traven
DOI :
https://doi.org/10.14428/mnemosyne.v0i4.12233Mots-clés :
Traven maritime, destin, fatalité, bateauRésumé
Le topos de l’embarquement vaut généralement amorce narrative. B. Traven, écrivant Le Vaisseau des morts (Das Totenschiff, 1926), diffère ce moment, qui devient central. Il fait courir sur quatre chapitres la scène-charnière où le narrateur rencontre un navire louche auquel, par un échange de dupes, il se lie. L’apparence d’une embarcation, funeste ou propice, s’avère ou se dément au fil du voyage: le pari sur la fortune du bateau est au programme du récit maritime. Mais qui miserait sur le mauvais ? Le discours pluriel du narrateur sur son embarquement est confus : il se dit libre ; néanmoins, on doute qu’il agisse proprio motu ; il finit par invoquer le destin. Démêler les forces en présence conduit à examiner le processus en vertu duquel, selon Traven, toute vie sera happée par un mécanisme inexorable. Dans Le Vaisseau des morts, la marginalisation d’un narrateur à l’identité ‘flottante’ donne prise aux recruteurs. Une conscience aiguë de l’agencement du piège, sur le plan énonciatif, le marquage d’une temporalité fatidique, sur le plan narratif, caractérisent l’unique roman maritime de Traven, initialement présenté comme « Histoire d’un marin américain ».