2 Genre et Communication : quels enjeux pour les pratiques professionnelles...
Le genre apparaît comme une dimension non négligeable dans l’appréhension des
métiers et des parcours professionnels de la communication dans toutes ses déclinaisons
(relations publiques, presse, publicité, journalisme d’entreprise, communication
externe, interne, etc.). On trouve en sociologie du travail des recherches s’intéressant
au thème de la féminisation des métiers et des professions, qui, par exemple, interrogent
une possible dévalorisation induite par l’arrivée des femmes, se penchent sur une
division du travail « où se révèlent les principes de diérenciation et de hiérarchisation
entre les tâches masculines et féminines » (Malochet, 2007, § 6), ou encore posent la
question des discriminations en organisations. Ces travaux amènent à considérer la
transversalité des rapports de genre, puisque les trajectoires professionnelles doivent
être articulées aux modalités de travail et aux activités proprement dites. D’ailleurs,
pour Miller (cité par Caron, 2004), le genre occupe une position centrale dans la vie
organisationnelle.
Ainsi, depuis quelques années, certaines associations professionnelles, notamment
COM-ENT en France, ont pris l’initiative d’animer des réexions sur les pratiques
professionnelles et d’engagement contre le sexisme (« Toutes Femmes, Toutes
Communicantes »). Un mouvement similaire s’observe en Belgique, avec notamment
une réexion des communicateurs et communicatrices des institutions publiques sur
la dimension genrée de la communication produite, ainsi qu’au Canada et ailleurs dans
le monde, avec, par exemple, la mise sur pied de regroupements et campagnes comme
« Femme en Créa » (Québec), The Lost Girls Mouvement (EU) et Creative Equals (UK).
La mise en place de standards et de guides pour communiquer en évitant de mobiliser
des stéréotypes de genre et en favorisant diérentes formes d’écriture inclusive s’est
également répandue dans de nombreuses institutions publiques et éducatives. Les
quali catifs varient cependant ; dénir le problème ne fait pas consensus, comme
d’ailleurs ne fait pas consensus le type d’écriture à mobiliser pour prendre en compte
la dimension genrée de la communication. Enjeu de communication, enjeu pour les
communicateurs et communicatrices, la question du genre est donc centrale. Pour
Bertini (2006, 121) d’ailleurs, « toute situation d’information et de communication
se réfère implicitement au système de signication et d’interprétation que constitue le
genre », tandis que Coulomb-Gully (2009, § 32) estime que « toute communication
est par dénition genrée ».
Pourtant, la question du genre peut paraître délaissée par les sciences de l’information
et de la communication. Les questions relatives au rapport entre genre et pratiques
professionnelles des communications ont été davantage investies dans la littérature
anglo-saxonne, en relations publiques notamment (Daymon et Demetrious, 2014).
Les enjeux de la féminisation y trouvent une forte résonance, comme peut d’ailleurs
l’illustrer la récente étude menée par EUPRERA qui propose une revue de littérature
extensive, de 1982 à 2019 et met en évidence les enjeux de genre auxquels les femmes
qui pratiquent le métier sont confrontées (Topic et al., 2019). Par contraste, en France,
Virginie Julliard constate qu’« aucun courant de recherche ne s’est constitué autour
de la problématique du genre et de la communication » (Julliard, 2009, § 9). Les