Transformation pédagogique à l’université
et engagement des acteurs
Stéphane Bellin
Maître de conférences
Univ. Grenoble Alpes, GRESEC
stephane.bellin@univ-grenoble-alpes.fr
Émilie Flon
Maitresse de conférences
IUT2, Univ. Grenoble Alpes, GRESEC
emile.on@univ-grenoble-alpes.fr
Valérie Lépine
Professeure des universités
ITIC, Univ. Paul Valéry – Montpellier 3, LERASS
valerie.lepine@univ-montp3.fr
2 Ressources pédagogiques et professionnalisation dans les formations à la communication
Résumé
Lancée est un projet collectif de renouvellement des pratiques pédagogiques porté
par une équipe d’enseignants d’un IUT français qui s’inscrit dans la mouvance
des pédagogies actives à partir d’approches par compétences. Cette contribution
mobilise le cadre théorique de la sociologie de la traduction pour caractériser les
engagements permettant l’émergence et le développement du projet. L’analyse
croise au niveau méso, la façon dont le projet a pu « prendre sa place » au milieu de
logiques institutionnelles hétéroclites et, au niveau micro, les logiques individuelles et
collectives à partir des représentations et expériences vécues par les parties prenantes.
En identiant les actions d’enrôlement et les ajustements des acteurs hétérogènes,
l’analyse montre comment les comportements et activités des individus varient
selon les étapes d’un processus d’innovation au sein duquel Lancée s’est construit,
transformé et reconguré. Un corpus d’entretiens qualitatifs et une observation
participante ont permis d’étudier les controverses et les traductions aboutissant à la
concrétisation du projet de transformation pédagogique.
Mots-clés : transformation pédagogique, sociologie de la traduction, TAR,
controverses, compétences
Abstract
LanCée” is a collective project of renewal of pedagogical practices led by a team
of teachers of a French university institute of technology. “LanCée” follows the
trend of the active pedagogical movement, based on competency-based approach.
This approach pulls on the theoretical framework of the sociology of translation to
characterize the decisive elements that allowed the emergence and development of the
project. At a meso-level, the analysis cross-references the way the project was able to
“take its place” in the midst of heterogeneous institutional logics and, at the micro-
level, the analysis cross-references the individual and collective logics based on the
representations and lived experiences of the stakeholders involved. By identifying
the enrollment actions and adjustments of heterogeneous actors, the analysis shows
how the behaviours and activities of individuals vary according to the stage of the
trajectory of an innovation process within which LanCée was built, transformed and
recongured. A corpus of qualitative interviews and an observation of the participants
over three years were used in order to study the main controversies encountered, and
the
Keywords: pedagogical transformation, sociology of translation, Actor Network
Theory (ANT), controversies, competency
Transformation pédagogique à l’université et engagement des acteurs 3
Introduction
Un projet de transformation pédagogique à l’université
Initié en 2018, Lancée1 est un projet collectif de renouvellement des pratiques péda-
gogiques porté par une équipe d’enseignants du département information-commu-
nication de l’IUT 2 à Grenoble. Il s’inscrit dans la mouvance actuelle de la pédagogie
universitaire, qui tente d’innover en expérimentant des modalités d’apprentissage
actif (Bédard et Béchard, 2009) à partir d’approches par compétences orientées vers
la professionnalisation. Les acteurs concernés par Lancée dans ce département sont
220 étudiant·es en DUT, 25 enseignant·es statutaires, 70 enseignant·es vacataires,
3 secrétaires de scolarité. En outre, un réseau d’acteurs très divers a été impliqué.
Cet article rend compte de l’expérience Lancée. Il vise à caractériser les éléments
déterminants qui ont permis l’émergence et le développement du projet comme
démarche de changement : il s’agit de montrer comment s’est conduite cette démarche
et comment elle a pu s’inscrire dans une organisation et une constellation d’institutions.
Deux niveaux d’analyse se croisent : au niveau méso, la façon dont le projet a pu
« prendre sa place » au milieu de logiques institutionnelles hétéroclites, propres au
contexte universitaire, avec une gouvernance de bureaucratie professionnelle cohabi-
tant avec un système de travaux et de projets (Mintzberg, 1982) ; au niveau micro,
des logiques individuelles et collectives basées sur les perceptions, représentations et
expériences vécues par les enseignants ayant ou non choisi de s’associer au projet et
des partenaires externes sollicités en appui.
La posture réexive et rétrospective des contributeurs – impliqués dans Lancée –
l’acteur-réseau (Akirch, Callon et Latour, 1988 ; Akrich et al., 2006). En identiant
les actions d’enrôlement et les ajustements des acteurs hétérogènes, l’analyse montre
comment les comportements et les activités des individus varient selon l’étape de
la trajectoire d’un processus d’innovation. Il s’agit d’étudier la façon dont Lancée
s’est construit, trans formé et reconguré et de retracer une histoire collective des
alliances, des négociations et réadaptations ont été constantes. L’analyse rétrospective
est complétée par un recueil de données empiriques portant sur le vécu des diérents
acteurs de Lancée. 41 entretiens approfondis ont été réalisés par l’analyste du projet
engagée pour tirer les enseignements de Lancée en vue d’un éventuel essaimage.
L’article rappelle d’abord les principaux apports conceptuels de la sociologie de la
traduction et la méthodologie mobilisée puis présente les grandes étapes et principales
controverses qui ont traversées Lancée au cours de la première année, en suivant
le l directeur de la participation des acteurs humains. Si la théorie de l’acteur-
réseau souligne la collaboration entre acteurs humains et non humains (dispositifs
institutionnels, matériels ou réglementaires) au sein d’un système cohérent, cet article
1 Acronyme de « Locomotive-collaborative vers des Apprentissages Novateurs dédiés aux
Compétences des étudiant·es et des Enseignant·es ».
4 Ressources pédagogiques et professionnalisation dans les formations à la communication
choisit également de mettre l’accent sur l’engagement des acteurs humains dans la
mesure où l’une des particularités de l’expérience relatée se situe précisément dans sa
dimension collective.
La sociologie de la traduction, un cadre théorique
pertinent
Introduite dans les années 1970 par Bruno Latour et Michel Callon, la sociologie
de la traduction aussi nommée Théorie de l’acteur-réseau (TAR) a renouvelé profon-
dément les approches qui visent à appréhender la production et la stabilisation des
connaissances et des techniques. La sociologie des organisations y a puisé une
inspiration (Amblard et al., 1995/2005) pour renouveler l’analyse des changements
organisationnels traditionnellement étudiés à partir des notions d’acteur stratégique
et d’organisation comme système (Crozier et Friedberg, 1977). Le cadre théorique et
méthodologique de la TAR a aussi été largement relayé dans le champ du mana gement
de l’innovation appliqué à de nombreux objets de recherche, au-delà des dispositifs
techniques (Collin, Livian et Thiviant, 2016). Dans le champ des sciences de
l’information-communication, la TAR a notamment été introduite parmi les « Textes
essentiels » par Daniel Bougnoux (1993) puis elle a connu un certain écho parmi les
chercheurs en SIC s’intéressant plus particulièrement à l’innovation technologique.
Plus récemment, la TAR a montré son intérêt pour étudier les interactions dynamiques
permettant de concevoir et développer un dispositif de formation universitaire
(Larroche, 2014) ou encore pour questionner les rôles et gures de « passeurs »
dévolus aux acteurs des transformations pédagogiques à l’université (colloque Apiu,
2020).
Notre démarche s’inscrit dans la perspective constructiviste de la sociologie de
la traduction qui porte non sur les résultats stabilisés des innovations (quelle qu’en
soit la nature) mais sur les processus concrets qui les ont rendues possibles. Ces
processus dépendent largement des coopérations, des négociations, des réajustements
qui s’opèrent tout au long d’un projet dans un cadre pluridimensionnel (le “réseau
socio technique”) les matérialités, les inscriptions sont indissociables des (inter)
actions et des représentations humaines formant ce que la TAR nomme les “actants”.
Le terme emprunté à Greimas permet de désigner dans un principe de symétrie toute
entité ontologique (humaine et non humaine, technique ou discursive) ayant une
valeur sémiotique, c’est-à-dire faisant sens dans le projet d’innovation. Ainsi, ils sont
saisis dans l’analyse des composantes habituellement hors du champ d’étude ou non
articulés dans leurs inter-relations. Dans le contexte pédagogique étudié, les artefacts
supportant le déploiement de méthodes innovantes sont des dispositifs à la fois
organisationnels (e.g. la possibilité d’introduire de la exibilité dans les emplois du
temps), matériels (e.g. équipement des salles avec un mobilier adapté, petit matériel,
accès wi, etc.), cognitifs (e.g. ingénierie et supports pédagogiques, ouvrages), et
Transformation pédagogique à l’université et engagement des acteurs 5
aussi discursifs (e.g. appel à projets et réponse, comptes rendus d’avancée du projet,
formalisation de documents d’appui, prises de parole, etc.).
L’acteur-réseau (ici le collectif Lancée) s’exprime ainsi comme un « ensemble
d’entités humaines et non humaines, individuelles ou collectives, dénies par leurs rôles,
leur identité, leur programme » (Callon, 1992) et se dénit par ses relations avec d’autres
qui le transforment et qu’il transforme en retour à partir d’une « problématisation »,
soit l’identication (provisoirement) commune d’un état qui fait problème et trace
une ligne de partage entre ce qui fait accord et désaccord. Cette problématisation
a donné lieu à des « controverses » que le projet d’innovation n’a traversées qu’au
prix de « traductions » rendant intelligible l’enjeu du projet. La traduction permet
de rendre commensurables des énoncés qui font l’objet d’interprétations initialement
incompatibles – par exemple, dans notre étude, l’acception attribuable à la notion
d’« approche compétence » dans le contexte universitaire.
Ainsi le projet Lancée est analysé comme un acteur-réseau engageant une diversité
d’acteurs et d’actants, intervenant dans la promotion de la transformation des
pratiques pédagogiques à diérents niveaux (institutionnel, organisationnel, équipe
projet). Sans prétendre rendre compte exhaustivement de toutes les dimensions du
projet et de toutes les dynamiques qui le sous-tendent, la présente contribution met en
évidence certaines caractéristiques de son évolution et en particulier les principales
controverses qui ont été soulevées – et ont été en partie dépassées grâce aux eorts de
traduction opérés.
Une méthodologie qualitative
L’approche ethnographique de la TAR permettant d’observer « la science (ou le fait)
en train de se faire » suppose une observation participante et une immersion de longue
durée dans le milieu considéré. La méthodologie repose sur le croisement, d’une part,
d’observations en situation des actants de toute nature et d’analyses a posteriori des
auteurs, tous trois impliqués dans le projet Lancée à diérents titres et d’autre part,
des résultats d’une enquête qualitative menée par entretiens (individuels et groupe)
auprès de 60 personnes2. Une ingénieure de recherche formée en anthropologie a
été engagée pour mener et analyser ces entretiens, an de répondre à la volonté des
porteurs de projets, de permettre une analyse des facteurs de succès et/ou des limi-
tations rencontrées à des ns d’essaimage éventuel dans les autres départements de
l’IUT voire de l’université. Les entretiens de type semi-directif (d’une durée d’une à
deux heures) ont été conduits par cette analyse indépendante sur la base d’une trame
de questionnement élaborée conjointement avec le collectif Lancée. La garantie
d’anonymat a été une condition permettant à chacun de s’exprimer librement sur le
2 31 enseignants membres de l’équipe pédagogique et de la direction du département porteur
du projet ; 22 étudiant·es ; 4 formateurs/trices ; 3 membres de l’équipe de direction de l’IUT2 et
représentant du centre des compétences et des métiers, service d’appui à la professionnalisation.
6 Ressources pédagogiques et professionnalisation dans les formations à la communication
projet et sur sa propre implication aux diérentes étapes. Un rapport de synthèse3
a été produit en retenant de nombreux verbatim (rendus anonymes) illustratifs des
controverses identiées. Ce point de méthode comporte un atout indéniable celui
d’un recueil de discours non biaisés par la crainte d’une exposition personnelle.
En contrepartie, il présente l’inconvénient que les chercheurs (porteurs du projet)
n’aient pas l’accès à l’intégralité des transcriptions d’entretiens. Cet écueil apparaît
acceptable dès lors qu’il ne s’agit nullement, dans la perspective de la sociologie de la
traduction, d’identier des « logiques d’acteurs » favorisant ou freinant le projet mais
plus largement de cerner les dynamiques d’interactions et d’évolution à la fois nes et
complexes impliquant une diversité d’actants humains et non humains.
1. Instaurer le processus de changement :
problématiser et enrôler
1.1. La naissance du projet autour d’un primum movens
pluriel : la problématisation
Cette première partie décrit le contexte de l’émergence de Lancée à l’aide de la théorie
de la traduction (Callon, 1986). Ce modèle met d’abord l’accent sur l’étape durant
laquelle les acteurs se dénissent et se rassemblent autour d’une « problématisation »,
ici la transformation des pratiques pédagogiques d’un département académique. Durant
cette étape, la créativité enseignante est soutenue par des dispositifs institutionnels de
formation et de nancement : Lancée et l’innovation qu’il représente s’appuient sur
un ensemble d’individus, d’institutions et de réseaux déjà en place dès le montage du
projet.
L’idée de déposer un projet au nom d’une équipe pédagogique est issue d’un atelier
animé par deux enseignantes formées aux méthodes de la créativité (Creative Problem
Solving) par Promising, un IDEFI4 grenoblois destiné à développer les compétences
de créativité chez les enseignants et les étudiants. Cet atelier (octobre 2017) réunissant
les enseignants avait pour objectif initial de trouver un meilleur fonctionnement
sur l’épineuse question du partage des responsabilités administratives. Cependant
l’espace discursif et créatif ouvert par les méthodes d’animation mobilisées, dans
l’espace physique d’une « salle de créativité » récemment aménagée par l’IUT2 (avec
chaises et tables mobiles, diverses surfaces pour prise de notes collectives...) a abouti
au constat que les priorités de travail de l’équipe n’étaient pas la répartition de ces
3 Gaidatzis Ch.. 2020. Lancée, un regard anthropologique sur un projet de changement pédagogique
en IUT. 55p. Rapport d’analyse du projet Lancée.
4 Les Initiatives d’Excellence en Formations Innovantes (2012-2019) issues d’un appel à projet
national de 2012 dans le cadre du Programme d’Investissements d’Avenir (PIA), doivent prégurer
les futures formations universitaires de l’enseignement supérieur français et promouvoir de nouvelles
démarches pédagogiques et de nouveaux contenus.
Transformation pédagogique à l’université et engagement des acteurs 7
responsabilités mais la pédagogie et le relationnel – entre collègues, entre enseignants
et étudiants. À partir de ce constat, deux enseignantes ont pris la décision de monter
un projet pédagogique qui prenne en compte cette dimension relationnelle. Ce noyau
initial peut être identié comme le primum novens.
Quatre premiers nancements ont été obtenus en 2018 par les deux enseignantes-
pilotes pour monter le futur projet Lancée. Si ces micro-projets de montage étaient
courts (entre une semaine et 6 mois) et de faible budget (entre 1500 et 3000 euros),
l’existence et la diversité des appuis nanciers montrent que l’impulsion donnée par
les deux enseignantes a disposé d’un soutien et d’une valorisation dans les dispositifs
institutionnels dédiés à l’innovation pédagogique universitaire depuis quelques
années. Un premier nancement de l’IUT2 de Grenoble a permis de créer un fonds
au centre de documentation portant sur la pédagogie universitaire, qui a constitué
le fondement théorique de Lancée. Un second nancement de l’IUT2 et Erasmus a
nancé pour deux enseignantes un voyage de 5 jours à l’université de Turku-AMK,
l’une des sources d’inspiration de Lancée. Le troisième nancement obtenu auprès de
Promising a permis de préparer et animer deux ateliers créatifs mobilisant l’ensemble
des enseignants du département Information-Communication an d’élaborer collecti-
vement le contenu et les objectifs du futur projet Lancée5.
Les axes de Lancée ont été dénis à cette occasion : les pédagogies actives (propres
à la culture des IUT mais qui gagnaient à s’armer) et l’évolution de la posture de
l’enseignant-sachant vers un coach-accompagnateur au service des apprentissages
des étudiants. Ces deux axes mettaient en œuvre les préoccupations relationnelles
expri mées lors du premier atelier créatif. Ces ateliers créatifs ont également amorcé
une culture commune du travail collaboratif et des pédagogies actives au sein du
département IC, qui a été entretenue tout au long du projet Lancée. Le quatrième
nancement mobilisé était issu des relations internationales de l’université et s’appuyait
sur un partenariat historique de l’IUT2 avec l’université nlandaise Turku-AMK. Une
enseignante nlandaise régulièrement invitée et ayant une activité reconnue dans le
transfert international de compétences en pédagogie universitaire a été sollicitée.
Lors de son séjour, plusieurs éléments clés du projet ont été établis : nécessité d’un
diagnostic de la pédagogie au départ du projet, grandes étapes temporelles et jalons
méthodologiques incluant la mise en place d’un modèle pédagogique théorique,
stratégie d’essaimage, nom du projet. Cette expertise internationale a été déterminante
pour conforter la légitimité du projet Lancée et susciter l’intérêt de collègues au-delà
du binôme initial qui s’est, dès lors, reconguré en équipe-projet ouvrant la voie à une
projection à l’échelle du département.
Ainsi avec l’appui de la direction du département et de l’équipe pédagogique en
réunion plénière l’intéressement des acteurs a pris un caractère ociel. Sous réserve
d’un engagement préalable, le dispositif de l’IDEX permettait la demande d’heures
5 Les ateliers de mars et juin 2018 ont produit 105 idées, dont 15 idées majeures issues de l’intelligence
collective intégrées au projet Lancée lors de sa demande de nancement.
8 Ressources pédagogiques et professionnalisation dans les formations à la communication
complémentaires pour chaque enseignant s’engageant dans la transformation
pédagogique d’un cours. Avec l’approbation quasi unanime de l’équipe s’amorçait
déjà pour l’intéressement des acteurs un appui sur la structure institutionnelle du
département et sur ses manifestations ocielles dans l’espace-temps de l’équipe (les
réunions d’enseignants en poste).
Parmi les acteurs de la traduction, le primum movens (celui par qui l’action est initiée)
est un ensemble d’individus qui mettent à disposition des dispositifs de formation
et de nancement. Le primum movens initial a consolidé son impulsion avec deux
collègues supplémentaires qui vont composer le noyau du projet IDEX de son début
à sa n : un enseignant de l’équipe du département a construit le cadre théorique du
projet à partir du fonds documentaire acquis, et l’enseignante professeure invitée a
partagé son expérience et sa méthodologie de pilotage de projet. Ces deux individus
supplémentaires intégrés au primum movens ont apporté ainsi un ancrage théorique
et une projection temporelle à Lancée. Un peu plus d’un an après le premier atelier
créatif, un nancement conséquent a été attribué par l’IDEX grenoblois au projet
Lancée pour 2 ans. Cette attribution a engagé l’étape d’intéressement et d’enrôlement
des acteurs.
1.2. L’intéressement et l’enrôlement des acteurs
Dans le modèle de la sociologie de la traduction, l’intéressement se dénit
comme l’ensemble des actions par lesquelles le traducteur « s’eorce d’imposer et
de stabiliser l’identité des autres acteurs qu’elle dénit par sa problématisation »
(Callon, 1986, p. 185). L’enrôlement est en quelque sorte un degré supplémentaire
d’investissement, un « mécanisme par lequel un rôle est déni et attribué à un acteur
qui l’accepte » (Callon, 1986, p. 189). Ici, il est montré que l’équipe-projet mais aussi
le projet lui-même opèrent cette intégration des acteurs : participation des enseignants
et des étudiants, recrutements de personnels et prestataires, collaboration des services
administratifs.
Les enseignants du département IC ont été mobilisés sur la base du volontariat dès
les deux ateliers créatifs de montage, puis pour des formations et ateliers collaboratifs
durant le projet. L’adhésion libre au projet, par l’intérêt qu’il a suscité et le sens que
les enseignants lui ont donné, était une dimension présente tout au long de Lancée,
même si la pression sociale et l’incitation nancière à la transformation des cours ont
aussi, sans doute, participé à l’intéressement de certains volontaires. À compter du
début de son nancement, l’insertion de Lancée dans l’emploi du temps ociel de
l’équipe du département Info-Com a témoigné de la dimension organisationnelle de
l’enrôlement des acteurs : Lancée y apparaissait à travers des formations collectives
des méthodes pédagogiques telles que l’apprentissage par problème APP ou les
« ateliers tournants »), des séances de coaching animées par des formateurs externes,
et des ateliers dédiés à l’approche par compétences de l’IUT2 animés par la direction
et le Centre des Compétences et des Métiers de l’IUT2. L’emploi du temps de l’équipe
Transformation pédagogique à l’université et engagement des acteurs 9
Info-Com a goné signicativement. D’ailleurs, un calendrier et un document
« boussole » ont été diusés et achés dans la salle commune de la photocopieuse,
pour permettre aux enseignants d’avoir une vue d’ensemble des événements. Ces
derniers restaient des propositions auxquelles les enseignants pouvaient choisir de ne
pas répondre.
L’analyse des entretiens menés a montré a posteriori que parmi les nouveaux
titulaires et vacataires, Lancée s’est présenté comme une opportunité de formation
à saisir pour pallier les dicultés et parfois à la violence des débuts dans l’ensei-
gnement. Il s’agissait pour eux de construire leurs nouveaux cours en étant
accompagnés individuellement par une conseillère pédagogique, et de découvrir des
outils ou méthodes pédagogiques existantes qui pouvaient les aider à mener à bien leurs
missions. Les formations collectives étaient perçues également comme une occasion
de découvrir ou mieux connaître les autres enseignants et de s’intégrer à l’équipe. Pour
celles et ceux qui avaient déjà quelques années d’ancienneté, l’intérêt à remodeler des
cours qu’ils estimaient déjà « bien rodés » était moindre. S’ils n’escomptaient pas
particulièrement de « grands bouleversements pédagogiques », les collègues étaient
néanmoins curieux de découvrir de nouvelles techniques, imaginer des possibilités
d’améliorations éventuelles de leurs cours, et échanger sur leurs pratiques : « je n’ai
jamais su si je faisais bien ou pas ». Il s’agissait « d’avoir d’autres perspectives pour
ne pas toujours étudier les mêmes cours avec les mêmes formules... élargir un peu
son horizon », « sortir de son quotidien de travail »... Pour certains, la dimension
collective des échanges a motivé leur participation : « la volonté de repartir sur un
projet commun » après les crises successives qu’a connu le département, ou l’envie de
« recréer du lien avec l’équipe ».
Les statuts et la division du travail ont pesé dans l’investissement des enseignants :
malgré un intérêt prononcé pour les questionnements pédagogiques et les besoins
exprimés en formation, les enseignants contractuels n’ont participé que dans de
rares occasions aux formations proposées. La précarité de leurs statuts, le cumul
considérable d’heures de cours avec des contenus nouveaux créaient chez eux un
sentiment d’urgence ou un manque de disponibilité dicilement conciliable avec une
participation aux formations. De même, le manque de visibilité sur leur engagement à
long terme dans le département et donc dans les cours potentiellement investis en temps
pour la transformation pédagogique était un facteur discriminant supplémentaire.
Chez les vacataires « professionnels du milieu enseigné », la possibilité de reproduire
le même cours d’une année sur l’autre est plus élevée. En ce qui les concerne,
c’est davantage le sentiment de ne pas être dans leur domaine d’expertise lors des
enseignements qui les a incités à participer aux formations et accompagnements sur
leur temps personnel.
Quelques réticences au projet Lancée ont été exprimées, notamment parmi les
titulaires : la première était liée au vocabulaire employé, avec la notion clivante
d’« innovation ». Des inquiétudes étaient mentionnées dans ce sens : dimension
un peu normative du projet, impression « qu’on prend une ardoise, on eace et on
10 Ressources pédagogiques et professionnalisation dans les formations à la communication
recommence avec d’autres modalités parce que maintenant il faut faire comme ci et
comme ça ». La crainte que Lancée entre en tension avec une liberté pédagogique
chère à certains a été également manifestée : « [ce projet], ça permet d’une certaine
façon à des gens extérieurs de s’immiscer dans ton contenu pédagogique et dans ta
façon d’enseigner ». Des enseignants étaient par ailleurs sceptiques sur l’autonomie
des étudiants que laissaient imaginer certaines pédagogies actives : cette dimension
entrait en contradiction avec leur vision des savoirs à transmettre et leur semblait
incompatible avec les cours qu’ils devaient donner. Enn, ce projet impliquait une
certaine « remise à plat » des pratiques professionnelles qui était loin d’être évidente et
souhaitée par tous dans une même mesure. Au nal, malgré ces réticences, une grande
majorité de l’équipe titulaire s’est investie dans Lancée, avec un engouement plus ou
moins marqué et uctuant selon les étapes du projet et les formations proposées. Mais
il est notable que les normes et représentations de l’enseignement et de la liberté
d’enseigner ont été très présentes durant le projet, en soubassement de l’intéressement
ou des réticences des acteurs humains à leur intéressement.
L’intéressement des étudiants est intervenu une fois les transformations pédago-
giques eectuées. Les étudiants ont découvert notamment une nouvelle méthode
pédagogique qui a fait l’objet d’une formation spécique pour l’équipe : l’Appren-
tissage Par Problème (APP)6. Dans de nombreux enseignements, les étudiants se sont
retrouvés « acteurs de leur apprentissage » : ils ont reçu des consignes, des livrets
d’instructions à suivre, leur permettant de chercher des réponses par eux-mêmes. Ils
devaient mener à bien des projets en groupe, eectuer des recherches en dehors des
cours ou préparer ceux-ci en amont, se réunir, se coordonner en équipe, dans un emploi
du temps déjà dense. Dans les premiers retours faits par les étudiants, l’augmentation
de la charge de travail a régulièrement été mentionnée. De même, le sentiment d’être
laissé en trop grande autonomie a été évoqué. À travers les retours des étudiants, les
modalités d’évaluations ont aussi été interpellées : les travaux de groupe ont posé le
problème de la reconnaissance des eorts fournis par chacun, au-delà du résultat nal.
Des systèmes de notation adaptés aux méthodes mises en place ont alors été discutés,
an de pallier le sentiment d’injustice exprimé par certains étudiants.
L’intéressement et parfois l’enrôlement des personnels administratifs au niveau du
département a également été eectif : réservations de salles, relais pour les commandes
de matériel de créativité, inscriptions dans l’emploi du temps institutionnel. Un
phénomène illustre l’importance de la dimension matérielle de l’innovation : en un
an, une trentaine de rouleaux de paperboard ont dû être commandés à la demande des
enseignants, alors que ce matériel n’était pas utilisé auparavant. De manière détournée,
ces changements soudains advenus dans l’utilisation du matériel et les réservations de
salles laissaient entrevoir une modication dans les modalités pédagogiques à l’œuvre
au sein du département. Le matériel technique, le mobilier, les salles de cours, les
6 La majorité des enseignants titulaires (de 10 à 13 participants sur 17 titulaires) suivent l’intégralité
des séances APP.
Transformation pédagogique à l’université et engagement des acteurs 11
emplois du temps – jusqu’ici adaptés aux modalités classiques, se sont vus remis en
question pour correspondre au courant des « pédagogies actives » promu à travers le
dispos itif Lancée.
Le projet Lancée est devenu incontournable parce qu’il avait des moyens, et
existait dans diérentes sphères. Les conditions d’existence du projet à travers
une multitude d’actants humains et non humains – a contraint les enseignants à
le prendre en considération et à l’intégrer dans leur agenda quotidien, même si
certains enseignants y étaient réticents. L’appui de la direction du département IC
qui inscrivait les activités du projet dans le calendrier ociel, ainsi que l’attribution
d’un espace de travail dédié au projet (un bureau pour ses trois salariés) ont été des
manifestations du caractère incontournable que prenait Lancée. En eet, le projet a
recruté trois salariés (une conseillère pédagogique, un alternant en communication et
une analyste en sciences humaines et sociales) et des prestataires (formateurs/trices
et accompagnatrices-conseil), acteurs qui ont été de fait enrôlés par leurs missions
professionnelles. Le site web produit par l’alternant a également fait exister le projet
à l’extérieur du département IC. Par ailleurs, les recrutements et la gestion budgétaire
du projet ont entraîné l’intéressement des personnels administratifs de diérentes
instances : ceux de l’IUT, bénéciaire du projet, mais aussi les personnels des services
de la tutelle UGA, notamment la cellule pédagogique de l’UGA qui a participé aux
recrutements. Ainsi l’ensemble des dispositifs socio-techniques qui permettaient et
structuraient le projet (services administratifs impliqués, espaces de travail obtenus,
productions de communication du projet Lancée) ont légitimé le projet à un autre
niveau que les individus porteurs. L’intéressement et l’enrôlement des acteurs s’est
joué également au niveau institutionnel, lorsque Lancée a suscité une collaboration
avec les services dédiés à la professionnalisation des étudiants de l’IUT (le Centre des
Compétences et des Métiers-CCM), alors en charge du déploiement de l’APC à l’IUT,
et qui a donné lieu à l’une des controverses du projet.
2. Maintenir le processus de changement grâce à son
adaptabilité
Cette deuxième partie évoque la dernière étape de la traduction, celle de la
mobilisation. En se référant aux conceptions de la TAR, elle désigne l’alliance des
acteurs autour de consensus négociés qui permettent au réseau de fonctionner et de se
consolider (Callon, 1986, pp. 198-199). Ici, la mobilisation est questionnée au regard
des controverses rencontrées par le réseau d’acteurs réunis au sein du projet Lancée.
Les controverses font référence à l’ensemble des actions qui font dissidence (Callon,
1986, p. 199). L’objectif est de dévoiler les épreuves auxquelles a été confronté
le collectif an d’aborder les négociations et les déplacements qui en ont résulté.
Trois controverses sont analysées : l’appropriation de l’approche par compétences
12 Ressources pédagogiques et professionnalisation dans les formations à la communication
portée par la direction de l’IUT2, les ateliers coaching et les doutes des enseignants
provoqués par les premières expérimentations auprès des étudiants.
2.1. La première controverse : le lien avec la démarche
compétence de l’IUT2
Comme tout projet de changement, Lancée ne pouvait espérer progresser qu’en
obtenant l’appui de la direction de l’établissement. Symétriquement, la direction de
l’IUT2 était engagée de longue date dans des actions visant à inscrire la spécicité
pédagogique des IUT au service d’une professionnalisation des étudiants devenue
un enjeu pour toute l’université (doublé d’une injonction ministérielle). Dès lors, il
était logique de raisonner en termes d’alliance et d’intérêt mutuel à développer et de
soutenir des projets d’innovations pédagogiques valorisant pour les deux parties. La
TAR permet de montrer qu’il existe toujours un certain degré d’incertitude quant aux
résultats attendus à partir d’une analyse des stratégies d’acteurs. Ici, le point inattendu
qui se révèlera l’objet d’une controverse assez sourde mais puissante réside dans
l’acception et les représentations associées à la ’démarche compétence’. Sans pouvoir
développer dans la présente contribution l’ensemble des controverses académiques et
professionnelles, soulignons un écart d’énoncé entre deux visions en présence.
L’IUT2 a engagé depuis plusieurs années un programme de développement des
compétences des étudiants et de valorisation des compétences acquises auprès des
futurs employeurs via un portfolio numérique. L’appui d’importants nancements
nationaux, d’un partenariat international et d’experts reconnus du domaine (Le
Boterf, 2018) confère à cet acteur-réseau institutionnel un haut degré de légitimité.
De son côté, le collectif Lancée a souhaité répondre à une échelle plus modeste aux
attentes d’étudiants en quête de pédagogie qui leur permette de mobiliser activement
les diverses compétences académiques et professionnelles visées dans les diérents
cours. Schématiquement, la démarche de l’institution est fortement orientée vers
l’identication de compétences correspondant à des métiers bien identiés, lisibles
selon une nomenclature familière aux employeurs (savoir, savoir-faire, savoir-être
… complété par la vision plus dynamique d’un « savoir-agir » compétent développée
par Guy Le Boterf). Cette vision s’actualisait dans la construction de « ches-
métiers » dont la trame visait à relier des activités-types propres au métier visé et
des compétences professionnelles. Elle devait se propager par une communication
auprès des enseignants de ce travail, réalisée sous forme « d’assemblées générales »
en présence de la direction de l’IUT et par le service d’appui à la professionnalisation.
Dans un premier temps, les implications pédagogiques de cette approche par
compétences orchestrée par la direction étaient peu claires pour les équipes
pédagogiques. En Info-Com, ces assemblées générales étaient plus ou moins vécues
par l’équipe comme la réception d’informations « descendantes » qui demeuraient
assez loin de leur quotidien avec les étudiants. La vision de l’équipe pédagogique
était, quant à elle, davantage inspirée par une vision universaliste orientée vers le
Transformation pédagogique à l’université et engagement des acteurs 13
développement didactique des diérentes aptitudes des étudiants. Cette orientation
trouvait sa traduction dans toute une ingénierie d’accompagnement permettant aux
enseignants de vérier la mobilisation de ressources dans des activités pédagogiques
sortant du cadre de la transmission traditionnelle des connaissances. Une conseillère
pédagogique spécialiste de ces méthodes a été recrutée par Lancée pour accompagner
les enseignants à partir d’ateliers collectifs et de suivis individuels outillés de nombreux
artefacts issus de son expérience antérieure (essentiellement des documents favorisant
la scénarisation de cours articulée à des compétences pré-identiées).
De nombreuses réunions ont été organisées par les deux acteurs-réseaux pour
promouvoir leurs approches respectives, non sans laisser de nombreux participants
dans un certain malaise compte tenu des représentations implicites sous-tendant des
interprétations divergentes, mais non totalement incompatibles entre les deux parties.
Une tierce personne a été recrutée par l’IUT2 et un consortium associé (au sein d’un
projet nancé pour la formation tout au long de la vie) simultanément au projet Lancée,
et mise à disposition du Centre des compétences et des métiers (actant important du
projet institutionnel) et du projet Lancée avec l’espoir qu’elle pourrait établir le lien
entre les visions divergentes. Son intervention comme « traductrice » s’est révélée
être un échec et la personne a été réaectée ailleurs.
La traduction entre les deux conceptions a nalement pu être opérée bon gré
mal gré pourrait-on dire – à l’occasion de la concrétisation d’une réforme longtemps
diérée et soudainement décidée au niveau politique pour une mise en œuvre dès
la rentrée 2021. L’approche par compétences imposée par le ministère de tutelle au
sein du nouveau diplôme du BUT (bachelor universitaire de technologie), et relayée
par l’association nationale des IUT, met en place au plan national la traduction
de l’approche de Jacques Tardif qui n’est pas centrée sur les métiers, mais sur la
capacité d’adaptation des étudiants à des situations professionnelles complexes – et
donc potentiellement en mutation (Poumay, Tardif et Georges, 2017). Les modalités
pédagogiques sont reliées aux compétences : l’approche par les pédagogies actives est
armée, et la posture pédagogique des enseignants prise en compte. C’est en quelque
sorte une traduction de la controverse « par le haut », qui articule une approche par
compétence cohérente avec les mises en œuvre pédagogiques portées par Lancée.
Au moment la réforme est en cours de déploiement, les enseignants n’adhèrent
pas tous à la conception institutionnelle dominante, ils y sont directement confrontés
car la réforme du diplôme impose aux enseignants d’opérationnaliser dans les
maquettes de formation l’approche compétences. La nécessité de traduire les cursus
en « référentiels de compétences » aecte directement la conception des formations
et des enseignements. Dès lors, le travail d’écriture des nouvelles maquettes de
formations force la traduction entre les visions. De ce contexte, émerge une nouvelle
perspective de rapprochement entre le projet Lancée et la direction de l’IUT2. Des
solutions très concrètes sont envisagées pour accompagner cette appropriation de
l’approche compétences et nalement une partie des ressources du projet Lancée est
mutualisée avec l’IUT2 pour répondre aux besoins de la réforme.
14 Ressources pédagogiques et professionnalisation dans les formations à la communication
2.2. La deuxième controverse : le refus des ateliers coaching
Lors du montage du projet Lancée, les ateliers de coaching ont été programmés dans
le but d’accompagner l’équipe pédagogique aux changements induits par le passage
aux pédagogies actives, qui nécessitent de recentrer la posture de l’enseignant sur
l’apprentissage des étudiants plutôt que vers la transmission de savoirs. Les porteurs du
projet ont fait l’hypothèse que l’intervention de coachs apporterait une aide précieuse
pour fédérer l’équipe pédagogique de sorte qu’elle traverserait ces changements
sereinement : ces ateliers devaient faciliter la prise en charge de la dimension
relationnelle entre enseignants et étudiants et entre enseignants. Les porteurs du projet
étaient persuadés de l’importance de cet accompagnement au point que les ateliers de
coaching ont initialement été conçus comme le l conducteur dès l’atelier inaugural
de Lancée. Pour les deux coachs sélectionnés, la première séance était l’occasion de
se concentrer sur la reformulation et l’appropriation collective des enjeux du projet.
Elles ont proposé une série d’animations basées sur une introspection collective des
représentations, des valeurs et des pratiques pédagogiques.
Cette première séance n’a pas eu l’eet escompté. Au contraire, elle a été très mal
reçue par le collectif Lancée, y compris par les porteurs du projet. Elle s’est déroulée
dans un climat tendu. Plusieurs enseignants ont quitté la séance avant la n et les
autres ont partagé leur désarroi de façon informelle les jours suivants. Elle a souvent
été vécue comme une perte de temps. Dans les entretiens, les participants évoquaient
un malaise individuel et collectif éprouvé au cours de cette expérience au point qu’elle
est même décriée avec virulence par plusieurs d’entre eux : « J’ai trouvé ça vraiment
lamentable ! Ce n’est pas forcément les personnes qui étaient en cause, mais je n’ai
pas trouvé que c’était pertinent(enseignant titulaire). Malgré la remobilisation de
l’équipe et des deux coachs pour réajuster le contenu et la méthode pour la deuxième
séance, l’expérience n’a pas été probante et les premières impressions négatives ont
persisté. Ce démarrage a été très préoccupant pour l’équipe Lancée conscient du
risque d’une désertion et d’une démobilisation potentielle de leurs collègues.
Avec le recul et l’analyse des entretiens, plusieurs raisons expliquent cet échec
des ateliers de coaching. Les premières séances se sont inscrites dans un dynamique
relationnelle encore fébrile au sein du collectif Lancée naissant. Pour la première fois,
les enseignants se réunissaient en dehors des réunions habituelles du département,
formelles et à vocation organisationnelle ou en dehors des rapports informels qu’ils
entretiennent entre eux dans les bureaux, les couloirs ou encore la salle de repas.
Dans ce cadre relationnel, les méthodes du coaching ont été ressenties comme trop
intrusives : « on doit se dire des trucs personnels [...] on n’a pas envie de dire des
trucs personnels à n’importe qui [...] c’était complètement décalé par rapport à ce
qu’on fait et à notre manière d’être » (enseignant titulaire). Le coaching a déstabilisé
le collectif dans ses habitudes relationnelles à un moment la plupart des enseignants
commençaient tout juste à remettre en question leurs méthodes pédagogiques. Dans la
forme, les coachs poussaient le collectif à se poser des questions sans pourtant apporter
Transformation pédagogique à l’université et engagement des acteurs 15
des réponses, ce qui le déstabilisait encore davantage. L’intérêt de cette posture n’a
pas été susamment expliqué par les coachs aux participants pour qu’ils s’investissent
dans cette direction et adhèrent aux propositions de ces ateliers. Certains membres
l’ont même vécu comme une injonction : « On est partant pour faire plein de choses
si on considère que cela peut avoir un sens, si cela nous apporte quelque chose, si on
comprend pourquoi on le fait, mais pas parce qu’on nous dit de le faire » (enseignant
titulaire). Dans le fond, les contenus abordés par les coachs sont également apparus
en décalage avec les attentes des enseignants. Ces derniers étaient en recherche
de solutions outils et méthodes très concrètes à utiliser directement dans leurs
cours. Si certains étaient prêts à découvrir le coaching à des ns pédagogiques, le
contenu des premières séances, trop axé sur le questionnement du collectif Lancée
autour d’objectifs communs à atteindre vis-à-vis des pratiques pédagogiques, n’a pas
répondu à ces attentes concrètes des enseignants. Au contraire, il a mis en évidence
les dicultés de l’équipe à communiquer et à s’entendre sur une vision collective des
pratiques pédagogiques. Les méthodes et les contenus mobilisés par les coachs n’ont
pas réussi à dépasser ces divisions et à renforcer le collectif Lancée. Si l’intéressement
des acteurs avait abouti à la création du collectif Lancée, la controverse des deux
ateliers coaching l’a considérablement fragilisé.
Soucieux de ne pas perdre la dynamique collective initiée par Lancée, l’équipe
du projet a alors pris conscience qu’il fallait accorder une attention plus poussée
et plus ne aux attentes et aux ressentis des enseignants. Pour remplir cet objectif,
des ches d’évaluation des ateliers à destination des formateurs et des participants
ont été élaborées. Elles ont été systématiquement utilisées dès la deuxième séance
de coaching et pour l’ensemble des autres formations. En se référant à la TAR, ces
artefacts ont contribué à opérer une traduction dessinant un consensus collectif, celui
d’une adhésion majoritaire aux formations proposées. Les résultats de ces ches
ont été très nets et ont permis de prendre des décisions sur la poursuite du projet.
Par exemple, l’équipe Lancée a mis n aux ateliers coaching. Cet arrêt n’a pas été
facile dans la mesure où ces derniers avaient été conçus comme le l rouge du projet.
Cependant, cette annonce brutale et la mise en place des ches d’évaluation ont eu le
mérite de re-mobiliser le collectif qui s’est alors senti écouté.
En parallèle, les ches évaluatives attestaient de l’engouement pour la formation
à l’apprentissage par problèmes (APP), qui est devenu le l directeur des activités
collectives. D’une part, cette formation a fait l’unanimité en répondant aux attentes
très concrètes des enseignants, c’est-à-dire trouver des idées pratiques applicables
directement dans leurs cours. D’autre part, elle a également trouvé sa légitimité par le
fait qu’elle était donnée par des enseignants-chercheurs expérimentés, qui utilisaient
l’APP collectivement dans leur propre département. En dépit d’une appartenance à
des champs disciplinaires diérents, une forte proximité au niveau des préoccupations
pédagogiques existait entre les formateurs et les enseignants du collectif Lancée. À
partir de cette adhésion commune, les formateurs en APP ont été en mesure d’opérer
une nouvelle traduction, celle de faciliter la communication et surtout de faire en sorte
16 Ressources pédagogiques et professionnalisation dans les formations à la communication
qu’émerge un consensus sur la nécessité d’investir et d’expérimenter collectivement
les pédagogies actives, ce que les coachs n’étaient pas parvenues à faire car trop
éloignées de la culture professionnelle de l’enseignement supérieur.
Cependant, rétrospectivement, plusieurs membres de l’équipe Lancée estimaient que
le coaching aurait pu être utile s’il était intervenu plus tard dans le projet, notamment
quand le collectif a été confronté à une autre controverse liée la diculté à changer de
posture dans le cadre de l’expérimentation de l’APP. À ce moment, il aurait pu sans
doute faire sens en répondant aux nouveaux besoins des enseignants déjà engagés
dans l’expérimentation.
2.3. La troisième controverse : trouver sa posture auprès
des étudiants
La formation APP a été suivie par la majorité des enseignants titulaires – treize sur
dix-sept enseignants. La rentrée universitaire suivant la formation, neuf enseignants
ont testé l’APP, auprès des étudiants. Puis, quatre ateliers supplémentaires ont
été programmés avec les mêmes formateurs an d’initier une « communauté de
pratique ». L’objectif était de pérenniser dans le temps les échanges pédagogiques au
sein du département. Avec leur accord négocié en amont, il était alors demandé aux
neuf enseignants engagés dans le test des nouveaux cours en format APP de partager
leurs expériences en petits sous-groupes auprès de leurs collègues pas encore investis
dans des transformations pédagogiques.
Les échanges se sont cristallisés sur les dicultés et les questionnements suscités
par la mise en place récente des nouvelles pratiques pédagogiques : le rôle, le statut
et l’identité professionnelle de l’enseignant ou encore les dicultés techniques
engendrées par des salles inadaptées. Finalement, les interrogations se sont focalisées
sur la posture à adopter dans le format APP. Certains ont exprimé la sensation de
s’ennuyer pendant que les étudiants travaillaient en autonomie, de ne plus être utiles. A
contrario, certains avaient le sentiment d’intervenir trop souvent auprès des étudiants
sans leur laisser susamment d’autonomie pour trouver des solutions ou mûrir leur
réexion. Ce verbatim illustre bien l’essor de la controverse : « En fait, j’ai eu des
doutes quand on a eu la formation collective en APP, parce que là j’ai entendu ma
collègue qui disait qu’elle, elle s’embêtait et qu’on ne la sollicitait pas alors que moi
je ressentais, j’avais l’impression d’être hyperactif, de passer d’un endroit à un autre,
d’un groupe à l’autre, de m’impliquer vraiment pour les accompagner. Et du coup
là, j’ai pris conscience, je me suis dit mince, peut-être que t’as pas la bonne posture.
Ça m’a remis le doute » (Enseignant titulaire). Le bouleversement de leur posture,
aussi bien physique que symbolique, était devenu problématique pour la plupart des
enseignants.
Cette controverse a été fortement accentuée par la réaction des étudiants, qui
ont réagi vivement aux nouvelles modalités de cours. Si certains d’entre eux y ont
adhéré complètement, une autre partie s’y est opposée fermement. Plusieurs raisons
Transformation pédagogique à l’université et engagement des acteurs 17
sont évoquées : une charge de travail trop importante, des cours pas susamment
structurés – « dans l’APP et en fait j’étais un peu perdue, je savais pas où aller »
(étudiante) –, une place trop importante accordée aux savoir-faire au détriment de la
théorie – « Ce que j’aurais aimé c’est d’avoir un petit cours théorique d’une heure
qui nous dise vraiment les bases des bases par exemple et qu’après on puisse avoir
un APP » (étudiant) –, trop d’autonomie dans l’apprentissage et la compréhension du
cours – « ce qui est remonté au dernier conseil de département [...], y en a beaucoup
d’étudiants qui disent ok, c’est intéressant, mais on voit pas trop notre bénéce, ça
nous fait travailler plus, en gros et que fait l’enseignant ? ! » « nous on en a quand
même besoin, les profs, ils sont là pour nous donner des cours avec des plans qui nous
évitent justement de nous perdre » (propos rapportés des étudiants lors d’un conseil
du département) –, les modalités d’évaluation trop axées sur le travail de groupe sans
prendre en compte l’investissement et les acquis individuels – « nous on sait que
dans un groupe, y a toujours quelqu’un qui a beaucoup plus travaillé que quelqu’un
d’autre » (étudiant). Ces critiques acerbes se sont exprimées dans plusieurs espaces
communicationnels, dans les cours auprès des enseignants, dans les réunions bilans
auprès des responsables de formation et dans le conseil de département par l’entremise
des délégués auprès des enseignants élus et de la direction. À travers leurs remarques,
les étudiants ont renforcé les doutes exprimés par les enseignants peu assurés dans
leurs nouvelles pratiques pédagogiques.
À ce moment précis, le collectif Lancée aurait pu s’aaiblir face à ces dicultés.
Néanmoins, les formateurs se sont mobilisés en concertation avec l’équipe Lancée
pour réajuster le contenu des ateliers suivants an de répondre aux doutes des
enseignants. La problématique de la posture a été travaillée collectivement sous
la forme de petits ateliers pendant lesquels les formateurs ré-endossaient leur rôle
d’experts. Ils partageaient leur expérience, ils donnaient des conseils, ils guidaient et
apportaient des outils. Ils ont assuré aux enseignants que les réactions des étudiants
et le tâtonnement des enseignants étaient très courants dans ces transformations
pédagogiques. En complément, les formateurs ont proposé d’inaugurer une nouvelle
forme d’apprentissage entre pairs, l’observation mutuelle de cours. L’objectif était
d’observer chacun à son tour son pair en train d’enseigner an de comparer ses postures
avec les siennes et d’entamer un dialogue constructif sur le rôle et le positionnement de
l’enseignant en cours. Pour inaugurer ces observations mutuelles dans le département
et pour bien expliquer le cadre éthique à respecter, les formateurs ont proposé de
commencer par venir observer leur propre cours en APP. Six enseignants se sont
saisis de cette opportunité. Si le deuxième atelier avait déjà permis pour certains
enseignants d’être assurés dans leur posture, l’observation des formateurs en cours a
clôt la controverse en permettant de traduire les doutes des hésitants en convictions
assurées comme le montre ce verbatim : « cela m’a énormément rassuré ; tu te dis que
pour eux cela fait des années qu’ils font ça et en gros c’est toujours le même bordel !
Ce que j’ai vécu, au nal c’est ce qu’ils font aussi. Ils ont quelques techniques et
savoir-faire que je n’ai pas encore, mais en gros ce qu’on a fait... on est dans le vrai et
18 Ressources pédagogiques et professionnalisation dans les formations à la communication
pas complètement à côté de la plaque ! » (enseignant titulaire). Le deuxième atelier de
la formation APP et les observations des cours des formateurs ont fonctionné comme
traduction pour dépasser cette controverse et convaincre les enseignants dans les
nouvelles postures adoptées par le changement de pédagogie.
Pour autant, si les observations des cours des formateurs ont fonctionné pour
quelques enseignants, aucun n’a mis en place par la suite cette pratique avec l’un
des collègues du département. L’observation mutuelle de cours comme dispositif
fédérateur d’une communauté de pratique entre pairs n’a pas fonctionné. En eet,
ouvrir l’espace de son cours à d’autres collègues demeure encore très dicile, car la
crainte d’être mal jugé reste forte. Un lien de conance solide et authentique semble
être déterminant pour que des enseignants s’engagent dans une telle dynamique ce
qui n’était pas encore le cas à l’issue du projet Lancée : « Pour des observations
mutuelles, je ne choisirai pas n’importe qui. Je pense qu’on s’évalue entre nous quand
même la plupart du temps. Entre collègues, il y a un jugement. C’est ça qui est dicile
d’accepter. Mais après maintenant je prends de plus en plus de recul et je me dis...
je pense aussi le fait d’aller voir quelqu’un d’autre je me suis senti rassuré et donc
je peux accepter qu’on vienne me voir. Mais il faut des éléments de conance »
(enseignant titulaire).
Le projet a démarré à un moment le climat dans l’équipe n’était pas bon : le
dialogue pédagogique était réduit au strict nécessaire suite à des conits relationnels
forts au sein de l’équipe. De plus, certains collègues étaient clairement réfractaires à la
« mode » des techniques dites créatives ou de pédagogies actives (les séances « post
it » ne valent pas un cours de transmission…) ; d’autres collègues jugeaient le projet
attractif sur le fond mais beaucoup trop chronophage. Malgré ces freins, le projet a
pris une ampleur incontournable au sein de l’équipe, qui a en majorité participé aux
activités. Cette mise en regard des freins et des résultats montrent que les controverses
soulevées par le processus de changement ont été – au moins en partie – surmontées.
3. Conclusion et perspectives
L’impulsion par le primum movens puis l’intéressement et l’enrôlement des acteurs a
instauré un processus de changement soutenu par un contexte institutionnel favorable.
Ce processus a été poursuivi grâce à l’adaptabilité du projet qui s’est déroulé sur trois
ans (y compris l’année de montage).
Lancée a permis une véritable réexion sur les pédagogies au sein du département
et les échanges ont été renouvelés dans l’équipe, recréant du collectif dans une
équipe initialement fragilisée par des conits. La pédagogie n’est plus une boîte noire
individuelle, mais s’est ouverte à la discussion collective. Du côté des étudiants,
Lancée a remis les apprenants au cœur des discussions, permettant une meilleure prise
en compte de leurs ressentis et prises de parole. À ce titre, Lancée peut se prévaloir de
l’obtention de résultats quantitatifs concrets : 63 cours ont été transformés, soit 100h
de formation au total ; 24 enseignants se sont engagés dans la transformation de leurs
Transformation pédagogique à l’université et engagement des acteurs 19
cours, dont plusieurs vacataires ; 220 étudiants ont expérimenté ces transformations
pédagogiques.
Les controverses traversées par le projet et les adaptations qui ont suivi, ont permis
de prendre en compte la réalité de ses acteurs humains au niveau du département
information-communication. À un niveau institutionnel, la traduction a permis à
Lancée de prendre sa place dans l’IUT2 et de faire accepter le processus de changement.
Ce sont la souplesse et les réorientations appliquées par l’équipe-projet qui
ont permis à Lancée de s’inscrire dans une dynamique élargie, de se pérenniser et
d’ouvrir de nouvelles perspectives. Une réforme nationale du diplôme délivré par les
IUT ouvre une nouvelle problématisation dans laquelle Lancée prend sa place et qui
semble suivre le même processus que celui analysé dans cet article. En eet, Lancée
a été prolongé et s’est positionné comme primum movens pour concevoir et déployer
une aide aux équipes pédagogiques pour la mise en place de la réforme du Diplôme
Universitaire de Technologie devenant le Bachelor Universitaire de Technologie. Les
outils et activités proposés par Lancée sont désormais ouverts à l’ensemble de l’IUT2,
élargissant l’enrôlement à d’autres départements.
Dans cette dynamique de changement, le basculement au « tout numérique » ou
à l’hybride dû aux restrictions sanitaires imposées par la pandémie COVID19 a
suspendu la mise en œuvre des méthodes de pédagogie active développées pour un
contexte d’enseignement en présentiel. La digitalisation forcée des enseignements
paraît engager une nouvelle controverse dont on ne connaît ni l’ampleur, ni l’issue, ni
les conséquences pour les processus de changements institutionnels et pédagogiques
engagés par les acteurs.
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