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personne pour un type de vie donné. Alors que la capacité peut s’actualiser ou non, la
capabilité est réelle et actuelle.
Pour Amyot, la déprise s’observe par l’« inversion des rapports d’autorité […] dont
la manifestation la plus tangible sera la prise de pouvoir de l’entourage sur les
conditions de vie de la personne » (2012, p.132). A terme cette inversion aboutit au
processus de non-reconnaissance et de privation des droits et des ressources qu’est
l’exclusion, et qui se réalise « à l’encontre de certains segments de la population, […]
à travers des rapports de forces entre groupes aux visions et aux intérêts divergents »
(Billette et Lavoie, 2010, p.5).
La vieillesse est souvent associée à la déprise, le fait d’abandonner certaines
activités pour se concentrer sur les plus significatives compte tenu de l’identité que le
sénior tente de préserver (Lavoie et al., 2011). Pour que le sénior puisse accepter sa
nouvelle situation identitaire, il faut qu’il ait intériorisé de nouvelles normes : la prise
de conscience d’autres limites, l’acceptation de ne plus pouvoir faire certaines choses.
Or, ce « jamais plus » renforce l’angoisse du déclin (Trincaz, 2015).
4.3. L’autonomie
Alors que la dépendance affiche les notions de déficience, d’incapacité, de soutien,
de relation d’aide, d’échange…, l’autonomie fait l’apologie de la potentialité, la
capacité, l’indépendance, le contrôle, le libre-arbitre, elle crée une vision positive de
la vieillesse. Il n’y a pas encore de « transfert du pouvoir de décision » (Amyot, 2012,
p.218).
Ce transfert engage le verdict de la perte d’autonomie : ne plus pouvoir agir par soi-
même. A titre individuel, il s’agit d’un constat de perte ; pour le grand âge collectif, il
s’agit d’une précaution à des fins de protection ouvrant le débat sur le droit au choix
et le droit au risque au grand âge. Le contrôle social va s’exercer ici à partir de la
représentation de la vieillesse. Quand le contrôle prend le dessus, le corps social réduit
l’univers existentiel du grand sénior aux actes élémentaires de la vie quotidienne
utilisés pour calculer le niveau de dépendance. (Amyot, 2012).
Comme les craintes liées aux responsabilités nourrissent les pratiques sécuritaires,
et comme la notion de responsabilité est générale, morale, philosophique, avant d’être
juridique, les professionnels ou les proches des personnes âgées sont sur la défensive.
Il y a une tendance générale à notre époque à confondre autonomie et responsabilité.
Cette dernière est calculée assez intuitivement par les tiers qui évaluent les conditions
définissant le risque par rapport aux éventuelles sanctions sociales : la mise en sécurité
du sénior pour se sécuriser soi-même, le dilemme entre la non-assistance à personne
en danger et l’intervention abusive qui prive le sénior de sa capacité de choix. L’enjeu
est la prise de conscience de la complexité des situations vécues par les séniors et leurs
proches (Amyot, 2012). Mais comment vieillir dans une société qui présente son
rapport au monde excluant la vieillesse ?