134 Trajectoires professionnelles en communication
à jour une présentation pour un cours sur le milieu énergétique. Puis, finalement j’ai
assisté à toutes les présentations au plus haut niveau. J’ai observé les patrons, la
manière dont ils s’expriment… en fait, j’ai été un peu coaché par ce monsieur ». Pour
lui, quel que soit son titre, le communicant doit toujours être à côté de celui qui prend
la décision. L’accession à la fonction de directeur de la communication n’est souvent
liée ni à un changement de mission, ni à une augmentation des compétences qui
donnerait accès à un titre, mais à la perception de la mission de la communication par
le directeur général. En effet, la relation principale qui permet au dircom de construire
son ethos, en lien avec ses pratiques et ainsi de se professionnaliser, est celle qu’il
tisse avec le directeur général. Pour cela, il s’agit pour le dircom de réussir à construire
une relation basée sur la proximité, la confiance, qualités que l’on retrouve citées par
ces professionnels et qui viennent renforcer son ethos. « Il a fallu du temps pour nous
apprivoiser », nous dit un dircom en parlant de son PDG. Nous avions un « fonction-
nement très semblable ». L’accès à l’agenda du directeur général, la participation aux
comités de direction en sont des marqueurs forts, souvent évoqués lors des entretiens.
Dans son récit, DC8 nous dit que c’est grâce à son précédent directeur général qu’il a
obtenu son poste à l’issue d’études de droit public et sans avoir exercé de fonction de
communicateur au préalable. Pour DC1, qui a fait une formation en marketing et était
acheteuse avant d’évoluer vers des postes de communicatrice, « c’est avec l’arrivée
d’un dirigeant qui avait une grande appétence pour la communication que je suis
devenue dircom puis porte-parole ». Les exemples de ce type sont récurrents au fil de
nos entretiens. Les chasseurs de têtes spécialisés sur le marché de la communication
que nous avons interviewés confirment que de nombreux dircoms recrutés n’ont pas
forcément de formation en communication, même si la majorité a une antériorité dans
la communication. Certains, comme ici DC8, arrivent à la direction de la commu-
nication avec une expérience professionnelle dans d’autres secteurs, même si le
journalisme est majoritaire. Par rapport à d’autres directeurs, situés au niveau du
comité de direction, cet état de fait est particulièrement atypique. Nous le mettons en
relation, comme nous le développerons plus avant, avec la primauté du savoir-être par
rapport au savoir-faire dans la fonction de dircom.
C’est par l’appétence à la communication du directeur général que le dircom peut
construire son identité et faire évoluer ses missions. DC13, dircom d’un grand groupe
dans le domaine des services aux entreprises, nous raconte qu’il va mettre trois ans
« avec le président » à construire la communication du groupe dans lequel il est. Il
évoque dans son récit son expérience et ses changements de responsabilités en
fonction des changements de président : « à ce stade, le directeur des ressources
humaines me pique la communication interne mais je récupère le marketing » surtout,
il évoque « la chance d’avoir eu des grands patrons visionnaires ».
Au-delà de la construction discursive et à travers la « mise en scène » (Goffman,
1973) d’un ethos propre qui se dessine au fil des entretiens, ces professionnels tendent
à façonner une figure de dircom qui n’est ni évidente, ni logique, ni parfois légitime